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ICEA

Institut de coopération pour l'éducation des adultes

Catherine Jasmin - Jeudi 9 Mai 2013

Jeudi 9 mai 2013 - Anonyme (non vérifié)
Nom: 
Catherine Jasmin
Mon secteur d’activité: 
Étudiante à la Formation générale aux adultes (FGA)
Premier thème
Un Québec apprenant doit renforcer la reconnaissance publique et politique de l’éducation et de la formation des adultes.
1. Comment renforcer, au sein de la société, la reconnaissance de l’éducation et la formation des adultes ?: 
Je vais répondre tout à fait librement, en tant qu'adulte en formation, en m'inspirant de mon parcours personnel; un parcours semé d'embûches qui se sont inlassablement placés entre moi et mon ambitieux objectif, qui fût et est d'ailleurs toujours, de réussir la formation de mon choix (ou plutôt d’obtenir les connaissances nécessaires à mon accomplissement personnel). Une trajectoire que j'ai envie de partager à toutes et à tous, afin de peut-être, et ce, sans prétention, vous inspirer dans vos travaux lors du 24 Heures pour un Québec apprenant. Mise en contexte que j'ai envie d’intituler: « Quel rôle la société a-t-elle joué ou aurait-elle pu jouer en rapport avec l’atteinte de mon objectif de diplomation? » D'abord, vivant des troubles majeurs d'ordres psychosociaux, additionnés d'un trouble d'apprentissage non-diagnostiqué et ne disposant pas de ressources adéquates, j'ai dû quitter à contrecœur le secteur d'éducation des jeunes. Faute! La société c'est alors vite chargée de me classer dans la catégorie des décrocheurs. DÉCROCHEUSE suis-je devenue, malgré moi, alors que je ne tentais que de survivre psychologiquement et même, physiquement! Effectivement, cela peut surprendre lorsque je mentionne que j'ai toujours aimé l'école, que je me suis toujours vue ''décrocher'' un diplôme de mon choix, dans une formation qui me plairait, qui me permettrait de m'accomplir en tant qu'individu et qui me permettrait d'exercer pleinement mon potentiel, ainsi que mon rôle de citoyenne. Hélas, interrompre ses études semble être synonyme de suicide citoyen, un peu comme si cela nous plaçait automatiquement dans la catégorie des lâches de la société, des paresseux, des désabusés, un peu comme si ce statut et tous les préjugés qui viennent avec permettait à la société et à l'état de nous maltraiter psychologiquement, en nous maintenant à un niveau minimal d'instruction. Car s'il y a un message que l'on comprend très vite lorsqu'on est prêt à se lancer dans une mesure de formation, c'est qu’étant donné notre statut de décrocheur qui, comme on nous le dit ou nous le fait sous-entendre, a coûté très cher à la société, ce serait donc le minimum de contribuer à combler les postes disponibles en main-d'œuvre dont le Québec a tant besoin! Peu importe que cela nous intéresse, la société nous fait une fleur en nous y donnant accès, car, comme l'on m'a déjà dit: « Vous êtes une assistée sociale, vous recevez une aide de dernier recours payée de notre poche à nous, les contribuables, vous devriez revoir vos aspirations et être plus réaliste! Il vous faut trouver un choix de formation qui vous amène rapidement sur le marché du travail. Vous n'allez quand-même pas continuer pendant encore dix ans à vivre de notre main, n'est-ce pas? » Avec cette mise en contexte, il est évident que ma réponse à cette question portera inévitablement sur la question de la reconnaissance des capacités et des potentiels de chaque personne, peu importe son statut. Il y a des milliers de raisons qui font que l’on soit contraint d'interrompre notre formation initiale. Bref, le manque d'instruction d'une personne ne fait pas d'elle un être moins intelligent ou ayant moins de potentiel, au contraire, les ruses et les expériences qu'un individu développe en contexte de pauvreté et/ou d'exclusion sociale ne font qu'enrichir son bagage d'outils, l'instruction devenant alors un investissement permettant de mettre à contribution tous ces acquis et donnant à ces personnes la possibilité de contribuer à la société et ce, pas seulement au niveau de la main-d'œuvre. Pour toutes ces raisons, il est impératif que la vision populaire du décro-raccrochage change une bonne fois pour toutes. Car c'est carrément de l'intimidation sociétale dont il est question. Arrêtons de penser que de permettre à des adultes de s’instruire est une œuvre de charité, réalisons enfin que c’est plutôt un investissement et un choix de société qui contribue à enrichir le Québec de citoyennes et de citoyens disposants de tous les outils nécessaires afin d’exercer pleinement leur rôle et de contribuer activement pour toutes et tous, vers une société meilleure.
2. Comment renforcer, au sein du gouvernement, la reconnaissance de l’éducation et la formation des adultes ?: 
Toujours dans l’esprit du témoignage personnel, voici une mise en contexte qui pourrait s’intituler; « Qu’aurait-pu faire ou que pourrait faire le gouvernement afin de favoriser l’atteinte de mes objectifs? » D’abord, pour mieux situer celles et ceux qui me liront, ma démarche de raccrochage s’est initiée dès mes 16 ans, âge où l’on peut accéder aux Centres d’éducation des adultes (CÉA). Disposant d’un secondaire 1 complété et des matières de bases du secondaire 2, je me suis lancée. Mes objectifs se sont dessinés au fil de mes expériences et de ma prise de confiance en moi. Toutefois, j’ai dû rapidement refréner mes ardeurs car nombre d’embûches se sont placées sur ce long chemin. Tout en gardant en tête mon objectif de me diplômer, j’ai dû interrompre à plusieurs reprises mes démarches. Car si j’ai certes été confrontée à des défis au niveau personnel, j’ai surtout été freinée par le manque de ressources et/ou le manque de souplesse des programmes d’aide et de soutien. Un parcours qui aura été teinté d’un constant jugement de mes capacités et de mes aspirations. Bref, le gouvernement est la société et la société est le gouvernement. Ce n’est pas au hasard que je dis ça, car comme je l’explique plus haut à la première question de ce même thème, tant et aussi longtemps que la population ne reconnaîtra pas tout le potentiel d’enrichissement sociétal que peut offrir l’éducation et la formation des adultes, la cause ne risque pas d’aller loin dans les priorités gouvernementales. Et de l’autre côté, tant que le gouvernement ne prendra pas en considération toutes les particularités de l’éducation et de la formation des adultes, tout en changeant sa vision de ce qu’est la richesse d’un état, autrement qu'uniquement de par sa main d’œuvre, mais plutôt celle-ci en complémentarité avec une richesse intellectuelle, nous ne risquons pas d’être témoins d’une grande évolution de la vision populaire. (Dans les commentaires, je détaille mon parcours scolaire et soulève d’autres réflexions sur ce qu’aurait pu faire l’état pour me permettre d’atteindre mes buts.)
Deuxième thème
Un Québec apprenant doit répondre aux besoins diversifiés d’apprentissage des personnes et des collectivités.
1. Quels sont les principaux enjeux ?: 
Comment ne pas répondre l’humain ? Peu importe leur âge, leur niveau de connaissance, leurs facultés intellectuelles, leur milieu de vie, il en demeure que la société et l’état ont le devoir d’agir humainement et de permettre à ces personnes d’accéder au savoir qu’ils désirent acquérir et ce, dans la dignité. Lorsque j’y réfléchis, beaucoup de questions se bousculent, dans ma tête d’hyperactive avec déficit de l’attention; • Qui détient réellement (ou se permet d’avoir) le pouvoir de décider de l’avenir d’un individu ? • Comment (de quel droit) peut-on limiter l’accès aux connaissances à une personne, sous prétexte qu’elle n’a pas le potentiel ou qu’elle est trop éloignée de son but ? • Un certain niveau de maîtrise de la lecture, de l’écriture et du calcul n’est-il pas gage d’un minimum d’autonomie ? Pourquoi donc est-il encore et toujours si difficile d’avoir accès à ce minimum ? • La question qui tue : Pourquoi, mais pourquoi donc, qu’après un certain âge, nous n’avons pas accès à certains programmes, mesures et/ou avantages ? Une personne ayant dépassé les 20 ans, les 25 ans, les 30 ans ou même les 35 ans devient donc-t-elle miraculeusement à l’abri des défis et des imprévus de la vie ?
2. Comment résoudre les problèmes soulevés par les enjeux?: 
Pour éviter de me répéter, la réponse se retrouve aux questions 1 et 2 du premier thème, ainsi que dans les commentaires.
Troisième thème
Un Québec apprenant doit s’appuyer sur la collaboration des milieux et des réseaux de l’éducation et de la formation des adultes.
2. À quel projet collectif pourrais-je collaborer?: 
Bien entendu, j’aspire à poursuivre mon cheminement, malgré tous les défis et les embûches qu’il comporte. Comme personne, je me vois contribuer en partageant mon vécu, mes craintes et mes idées. Je veux m’ouvrir aux autres et connaître aussi leurs défis, leurs embûches et leurs idées. Bref, en tant qu’étudiante adulte, il est impératif pour moi de participer activement à tout ce qui concerne la politique en éducation et en formation des adultes (ou toute autre prise de décision en ÉFA de la part de l’état), car je demeure persuadée que si les étudiants adultes du Québec font partie du problème, ils font également partie intégrante de la solution !
Commentaires
Quelles sont vos attentes à l’égard du 24 heures pour un Québec apprenant?: 
J’aspire à un lieu de rencontre où l’on pourra prendre le temps de passer aux solutions !
Avez-vous des commentaires à ajouter?: 
Voici un carrément un curriculum vitae de mon parcours de formation (ou de mes nombreuses tentatives de raccrochage), j’ai envie de le partager car je juge qu’il soulève des réflexions pertinentes dans le contexte du 24 heures pour un Québec apprenant et qui sait, peut-être apportera-t-il des pistes de solutions? Bref, ce sera ma contribution personnelle. Raccrochage 1 et 2 (1999) : 1. J’ai alors 16 ans, un Trouble déficitaire de l’attention avec hyperactivité non diagnostiqué et je vis toujours de la violence dans mon milieu de vie, les mauvaises fréquentations et la drogue me guettent et je vis une énorme précarité financière (au point d’aller mendier pour casser la croûte). J’interromps ce raccrochage après quelques semaines, ma réalité devenant rapidement trop difficile à gérer. Résultats : Retour à la rue, mauvaises fréquentations, drogues. 2. J’ai toujours 16 ans, j’essaie un autre CÉA. Même scénario que le premier. Résultats : Retour à la rue, mauvaises fréquentations, drogues. Réflexions : Lors de mon accueil au CÉA, n’aurait-il pas été avantageux de me rencontrer et d’évaluer mes conditions de vie, mes aspirations, ainsi que des potentiels troubles d’apprentissages non-suivis et/ou non-diagnostiqués? Raccrochage 3 (2001): J’ai alors 17 ans, bientôt 18, je suis enceinte, j’ai complètement cessé de consommer, je base même mon alimentation sur le Guide alimentaire canadien et j’ai évidemment coupé les ponts avec les mauvaises fréquentations. Je suis plus que motivée à accéder à la connaissance afin de devenir, pour l’enfant à naître, une mère engagée dans une démarche et bien dans sa peau, une mère éduquée, instruite et diplômée, étant en mesure de disposer d’un minimum de qualité de vie. Je frappe alors un énorme mur. Aucune école ne peut m’accepter et je n’ai accès à aucune ressource financière. Résultats : Annulation temporaire du projet de raccrochage et travail (en attendant d’accoucher) dans une centrale de sondages téléphoniques. Un mélange de craintes, de doutes et d’espoirs quant à mon avenir scolaire tiennent mon esprit bien occupé. Réflexions : S’il est vrai que j’ai frappé à toutes les portes possible et envisageables, pourquoi ne m’a-t-on pas accueillie? Est-ce car je ne cadrais pas dans les programmes et mesures? Parce que j’étais mineure et enceinte? Parce que l’on doutait de mes capacités? Parce que mon projet d’avenir n’était pas assez «solide»? Ou encore parce que je ne disposais pas du soutien de mes parents? Bref, me butter à une série de portes toutes plus fermées les unes que les autres m’aura fait me questionner sur ma place et ma valeur dans cette société. Raccrochage 4 (2004) : J’ai maintenant 21 ans et je suis cheffe de famille monoparentale avec deux jeunes enfants. Remplie d’espoir par mon projet de retourner à l’école, je déménage dans Hochelaga-Maisonneuve, à Montréal, me disant que ce quartier, connu pour son indice de défavorisation, aura des ressources pour m’aider à m’en sortir. Je raccroche en adhérant au nouveau programme «Ma place au soleil», d’Emploi-Québec, alors destiné aux mères monoparentales de moins de 25 ans et n’ayant pas terminé leur secondaire. Je me rends rapidement compte que, malgré mon acceptation dans une mesure d’aide financière, ce retour aux études me confronte à de nombreux défis; • En effet, le montant de notre habitation, additionné au coût de nos besoins de base, nous confine automatiquement à une précarité qui devient vite angoissante. • Comme inévitable, la pauvreté, la mal nutrition, ainsi que les dépenses d’énergies en stress et en marches interminable pour économiser sur les transports ont rapidement pour effet de m’épuiser physiquement et mentalement. • Malgré tous mes efforts et la motivation qui m’anime, la fatigue altère mes capacités et la pauvreté occupe mon esprit. • L’on me demande de préciser mon objectif de formation, alors que je ne sais toujours pas vers quoi je veux aller. D’autant plus que les choix que l’on m’offre ne m’inspirent pas du tout. L’on menace de couper mes prestations si je ne fixe pas d’objectif de formation à l’emploi. Bref, je me tourne vers celui qui demande le plus de préalables et je le fais inscrire à mon dossier, car c’est le seul moyen que je trouve pour avoir accès à une presque formation de base. • Je rencontre aussi des difficultés avec mes enfants, sans entrer dans les détails, je dois composer au quotidien avec les particularités de chacun d’entre eux, l’un ayant un Trouble envahissant du développement (TED) et l’autre un Trouble de l’attention avec hyperactivité (TDAH). Le manque de temps et le manque de liberté m’empêchent de répondre convenablement à leur besoin et retarde les démarches vers les diagnostics. • De plus, l’ignorance de mon propre trouble déficitaire de l’attention ne m’aide guerre dans mes apprentissages. Résultats : Complètement épuisée, souffrant d’anxiété (diagnostiqué), tannée de ne pas être en mesure de faire une épicerie descente et de pouvoir payer mes comptes, consciente des besoins criants de mes enfants, je me vois dans l’obligation d’interrompre, une fois de plus, mon projet d’études. Aide sociale, recherche d’emploi, travail comme femme de chambre, retour à la case départ. Stress. Réflexions : En considérant la qualité du programme «Ma place au Soleil», je ne peux nier l’avantage que peuvent en tirer la plupart de ces jeunes parents monoparentaux aux études. Seulement, à qui cela s’adresse-t-il vraiment? Dans mon cas, j’aurais eu le bon profil si j’avais su dès le premier instant vers quelle formation je désirais me diriger et évidemment, il aurait fallu que celle-ci réponde aux critères imposées, soit au plus un DEP ou un AEC et ce, bien entendu dans la liste de choix offerts. Cela est toutefois compréhensif, venant de la part d’une instance ayant comme mission de répondre aux besoins du marché de l’emploi et de combler les postes à pourvoir en main-d’œuvre. Bref, si mon souhait était d’abord d’obtenir le diplôme d’études secondaires pour ensuite effectuer un choix de formation, je n’étais visiblement pas à la bonne place. Aussi, considérant tous les défis rencontrés par un parent seul et sans instruction, n’aurait-il pas été aidant, à ce moment, d’évaluer globalement les besoins familiaux, plutôt qu’individuels? Il est évident qu’un intervenant qualifié en la matière aurait rapidement constaté le besoin d’un logement subventionné, nous aurait dirigé vers une ressource alimentaire, aurait été en mesure de déceler mon TDAH et m’aurait guidé vers les ressources adéquates, il aurait probablement même été en mesure d’éviter l’anxiété causé par toutes ces contraintes. Bref, un service d’intervention global et familial pour l’adulte en formation, ainsi que des ressources externes offertes en concertation avec le milieu scolaire (logement social, aide familiale, ressource alimentaire) me semblent un excellent gage de persévérance jusqu’à l’atteinte du diplôme et /ou de l’objectif. Je me demande s’il serait vraiment plus dispendieux pour l’état d’offrir ces types de ressources, car il me semble qu’une économie considérable pourrait être faite en assurant à ces personnes un cheminement sans interruption, tout en évitant les épisodes d’anxiété et de dépression. De plus, il me semble que la formation de base (sec. 5) devrait être accessible avec une aide financière qui serait accordée par une instance qui aurait une mission autre que de former rapidement de la main-d’œuvre! Raccrochage 5 (2007 à 2009) : Cette fois-ci il s’agit d’un réel raccrochage à la société, maintenant âgée de 24 ans, en ayant plus que marre de vivre en marge de la société et voulant m’intégrer, coûte que coûte! C’est pourquoi je préparerai pendant près de 2 ans mon retour sur les bancs d’école. Pas question cette fois-ci d’échouer ma démarche. Je suis décidée à savoir où je veux aller, je veux trouver ma voie pour foncer vers mon objectif. Bref, dans un petit cahier, je m’élabore un plan de démarche afin de me préparer à un autre retour à la formation. Je commence en faisant une démarche en employabilité financée par Emploi-Québec : succès! Cela me motive encore plus et m’aiguille sur mes aptitudes, mes intérêts et mes capacités. Je poursuis ensuite en m’impliquant dans les milieux d’emplois que je convoite (bénévolement ou à faible rémunération) : succès! En plus de confirmer mes intérêts et mes aptitudes, cela affine mes choix, augmente ma confiance en moi, me donne accès à des formations en milieu de travail et m'introduit dans mon futur réseau professionnel. Finalement, armée de mon nouveau bagage et avec enfin un choix de destination, je me lance (encore) : raccrochage 6. Réflexions : Si je me fie à mon expérience personnelle et aux personnes en démarche que j’ai pu rencontrer et questionner, il me semble évident que de définir un objectif est quasi conditionnel à la persévérance aux études, peu importe le niveau. Cela dit, il serait probablement très avantageux d’offrir plus de programmes ou de services de type employabilité et orientation. Aussi, ces services gagneraient à être davantage connus de la population. Je persiste aussi à croire que les organismes communautaires jouent un rôle très important dans notre société et beaucoup au niveau de la formation des adultes. Car si l’on peut accéder à la formation citoyenne via ces organismes, ce sont souvent les intervenants de ces milieux qui réussissent à tisser des liens de confiance avec la population la plus marginalisée. De plus, ils contribuent à valoriser la personne dans ses aptitudes et ses intérêts. Pour moi, il va de soi que dans une relance des politiques, les organismes communautaires devraient disposer d’une meilleure reconnaissance de la société et de l’état et surtout, surtout, de meilleurs budgets, car ils doivent desservir leur clientèle dans des conditions qui ne reflètent pas l’état des besoins et leur volonté d’action! Je dois aussi mentionner l’importance du bénévolat. S’il existait une quelconque manière d’encourager et de valoriser l’exploration des milieux de travail par le bénévolat, particulièrement pour les personnes n’ayant toujours pas d’objectifs de vie ou de formation, cela leur permettrait certainement d’accrocher à quelque chose. Raccrochage 6 (2009) : Septembre 2009, maintenant âgée de 26 ans, n’ayant toujours pas plus qu’un secondaire 2, un fils âgé de 7 ans (en 2e année) et une fille âgée de 6 ans (en 1e année). En trois étapes faciles : Définition d’un objectif de formation, acceptation dans une mesure d’emploi-Québec, inscription à l’école! • Première étape; Objectif de formation : DEC en éducation spécialisée. • Deuxième étape; Obtenir un financement par Emploi-Québec : REFUSÉ! (Prétexte de trop grandes attentes, suggestions de revoir l’objectif de formation. Retour sur mon interruption en 2004, l’on sous-entend que je vais répéter «l’abandon».) • Troisième étape; Inscription à l’école : Fait. Maintenant, imaginez-vous être prestataire d’aide sociale, de devoir payer le service de garde à 2 enfants (7$/ jour/ enfant, sans repas), de devoir débourser près de 70$ pour une carte d’autobus, de payer les comptes, le logement, les fournitures scolaires et l’inscription, les vêtements et… bien entendu la nourriture, avec seulement un revenu de dépassant pas les 580$ par mois! Tout ça en restant concentré sur l’école et en répondant aux besoins des enfants. Je ne sais pas si c’est possible, mais moi je n’y suis pas arrivée. Bref, après un mois à l’école sans aide (par mes propres moyens), je m'absente de l’école pour un avant-midi et retourne à mon Centre local d’emploi. Cette fois-ci en pleurant toutes les larmes de mon corps. Je leur affirme haut et fort que je devrai, une fois de plus, quitter l’école par manque d’argent. Que je suis plus que motivée à réussir et à atteindre mes buts, que je suis prête à accepter n’importe quel DEP ou AEC pour avoir un minimum de qualité de vie. L’on m’accueille finalement (directement par le chef d’équipe) et l’on m’accorde enfin des prestations. (Toutefois, je suis contrainte d'inscrire une formation qui ne me plaît pas.) Presque résignée à accepter mon sort de ne pas avoir de diplôme d’études secondaires et devant absolument passer d’abord par l’obtention d’un diplôme que je n’ai guerre choisi, je poursuis ma trajectoire et tente tant bien que mal de m’intégrer dans mon milieu et de me dépasser. Je réussis à avoir une moyenne très enviable et à avancer beaucoup plus rapidement que ce que l’on attend de moi, j’en éprouve même de la fierté! Malgré tous les côtés positifs, il me faut me rendre à plusieurs rendez-vous par semaines pour les enfants, car à ce moment, je suis en plein dans les démarches pour l’obtention de leurs diagnostics. Bref, même si je présente des pièces justifiant mes absences, même si je maintiens un rythme compétitif dans ma formation, même si je garde ma moyenne de notes "dans le plafond" et même si je m’efforce d’être une étudiante impliquée, motivée et motivante, j’apprends, trois mois après mon acceptation, que l’on coupe mes prestations en raison de mon taux d’absentéisme trop élevé (selon les critères d’Emploi-Québec). L’équipe-école conteste cette décision (je leur en serai toujours reconnaissante), mais ce fût sans appel. «Sur le marché du travail, vous ne pourrez pas fonctionner de la sorte», me répétait-on. Ou encore; «C’est l’argent des contribuables que vous prenez!». Résultats : Je me retrouve, une fois de plus, exclue et sans diplôme. Par contre, le fait d’avoir goûté un peu au succès et de bénéficier du précieux soutien dont le personnel de mon CÉA fait preuve à mon égard n’a de résultat qu’à me faire retrousser encore plus les manches afin de poursuivre mon combat interminable. On passe au plan B! Réflexions : Comment ose-t-on traiter des ADULTES de la sorte ? Ai-je vraiment besoin de dire que si l’on repense l’éducation des adultes, il faudra tôt ou tard s’adresser aux individus chargés de donner vie ou mort à un dossier de prestation ? C’est complètement inacceptable et inadmissible d’empêcher une personne d’atteindre son but, alors qu’elle démontre une grande motivation et une capacité incontestable de réussir. Puis, je reviens encore et toujours sur la liberté de prendre la formation de son choix! Raccrochage 7 (2011) : Par contre, à savoir dans quelle drôle de société nous vivons, je réussis à entrer à l’université et à bénéficier d’une aide financière aux études! Mais je me rends vite compte qu’il me manque des acquis scolaires afin de réussir dans cette voie. Puis, le montant qui m’est accordé par les prêts et bourses me permet de me débrouiller que pendant un certain temps, une fois arrivée au bout de mes ressources, je dois, à mon grand regret, quitter à nouveau. Résultats : Anxiété. Recherche d’emploi et grands questionnements. Réflexions : Il est complètement absurde que l’université soit plus accessible que le secondaire général. Il est complètement absurde que les portes des cégeps soient fermées alors que celles des universités sont ouvertes. Il est complètement absurde que le ministère de l’éducation n’offre pas un programme d’aide financière pour l’obtention du diplôme d’études secondaire pour les adultes. Voilà, c'est dit. De plus, je dois réitérer le fait que toute personne désireuse d’entamer une démarche de formation devrait pouvoir accéder à la formation de son choix et ce, sans contrainte. Raccrochage 8 (2013) : Nous sommes aujourd’hui, je travaille et je me paie une formation. Pour le moment, je prends des cours à distance au secondaire général, je projette d’obtenir mon DES, même si l’on me répète que je n’en ai guerre besoin, j’ai décidé que j’allais quand même l'obtenir! Aussi, je suis en train de me préparer un nouveau dossier d’admission à l’université pour cet automne. À suivre... Réflexions : Je ne sais toujours pas ce que l’avenir me réserve, mais comme je dis souvent, l’objectif demeure le même, c’est la trajectoire qui sera différente, peu importe l’embûche rencontrée. Conclusion : Travaillons tous ensemble à lever les embûches pour tous les adultes apprenant du Québec désireux d’acquérir des connaissances par l’éducation et la formation des adultes, que ce soit pour eux-mêmes ou encore, pour s’intégrer dans la société et y participer activement. Bâtissons notre Québec apprenant! Merci de m’avoir lu et surtout, merci d’agir!