Remettre le développement de l’éducation des adultes sur les rails
Le 8 septembre dernier, un groupe d’organisations et de chercheurs en éducation des adultes publiait la déclaration intitulée Remettons sur les rails le développement de l’éducation des adultes au Canada. Rendue publique à l’occasion de la Journée internationale de l’alphabétisation, cette déclaration dénonçait notamment les conséquences du retrait du gouvernement fédéral en alphabétisation. Elle appelait par ailleurs les partis politiques fédéraux à faire de la nécessité de répondre aux besoins d’éducation des adultes en leur fournissant des possibilités d’apprentissage de qualité une priorité du prochain gouvernement fédéral.
En réponse aux préoccupations exprimées dans cette déclaration signée par l'ICÉA et appuyée par plus de 80 organisations et personnes actives en éducation des adultes, le Parti libéral du Canada (PLC) a fait connaître une série d’engagements chiffrés.
Dans la suite de cet article, l'ICÉA présente une synthèse de ces engagements qui annoncent une hausse des investissements à prévoir dans le domaine de l’éducation des adultes. Tout en étant profitable au développement du secteur, ce réinvestissement du gouvernement fédéral est attendu par de nombreux organismes dont le financement avait été amputé par le gouvernement sortant.
Les engagements des libéraux de Justin Trudeau
Question 1 : Les engagements en matière d’alphabétisation des adultes et de développement des compétences
Le PLC propose d’accroître « les investissements dans les formations axées sur les compétences grâce à une hausse annuelle de 750 millions de dollars dans les programmes de formation qui sont offerts en partenariat avec les provinces et territoires. » Cet engagement représente des investissements cumulés de près de 3 milliards de dollars sur quatre ans, de quoi « recommencer à “faire tourner la roue” », comme le soulignait le directeur général de l'ICÉA, Daniel Baril, au quotidien Le Devoir (Formation aux adultes : qu’en disent les partis politiques? 17 octobre 2015).
Question 2 : Un leadership fort et positif en faveur de l’alphabétisation, dans le respect de la juridiction fédérale
Tout en précisant que l’alphabétisation crée des possibilités au 21e siècle, le PLC s’engage à rehausser « de 200 millions de dollars par an le financement des provinces et territoires pour aider les Canadiennes et les Canadiens en dehors du marché du travail à obtenir les compétences de base en matière de lecture et de calcul pour avoir la chance de trouver un emploi décent. »
Question 3 : Des moyens pour assurer le respect des obligations constitutionnelles concernant les droits linguistiques des Canadiennes et des Canadiens francophones vivant en situation minoritaire
Le PLC s’engage à « sauvegarder et promouvoir » les langues officielles, notamment en veillant « à ce que les services offerts par le gouvernement fédéral soient tout à fait conformes à la Loi sur les langues officielles », en s’assurant « que les juges nommés à la Cour suprême maîtrisent les deux langues officielles à un niveau fonctionnel » et en cherchant « des occasions de promouvoir la langue et la culture françaises, que ce soit au Québec, auprès des francophones ou dans les communautés de langue française du pays tout entier. » Le PLC s’engage finalement à faire « un nouvel investissement annuel de 150 millions de dollars dans CBC/Radio-Canada » annulant du même coup les compressions budgétaires des Conservateurs.
Question 4 : Le financement d’une infrastructure stable qui permettra de répondre aux fonctions d’information, d'innovation, de recherche et de partage d’expertise dans le domaine de l’alphabétisation et du développement des compétences
Le PLC s’engage à collaborer « avec les organismes non gouvernementaux, et notamment avec les prestataires de services d’éducation pour adultes et les chercheurs, pour trouver des moyens plus efficaces d’assurer le financement du travail important qu’ils accomplissent. » Des préoccupations particulières vont notamment à l’amélioration des « mécanismes d’attribution du financement » des organismes à but non lucratif et à l’importance de « fournir un financement adéquat, prévisible et stable ».
Question 5 : L'intégration de l’alphabétisation et du développement des compétences essentielles dans les politiques sectorielles où ils peuvent jouer un rôle (emploi, autochtones, santé, environnement, culture, promotion des langues officielles, etc.)
Le PLC s’engage à travailler en collaboration avec « les gouvernements provinciaux, territoriaux et autochtones, ainsi qu’avec les municipalités, pour intégrer dans les politiques sectorielles le développement des capacités de lecture et d’écriture et la formation en compétences essentielles ». Au plan financier, cet engagement reprend le rehaussement souligné à la question 2.
Question 6 : L’inclusion du financement de l’alphabétisation et du développement des compétences dans la caisse de l’Assurance-emploi et la Subvention canadienne pour l’emploi
Le PLC s’engage par ailleurs à collaborer avec les provinces et les territoires afin de s’assurer que de « nouveaux fonds soutiennent leurs priorités de formation et les initiatives qui ouvrent la voie à des emplois de qualité ». Ces nouveaux fonds représentent une augmentation annuelle de « 200 millions de dollars du financement des provinces et territoires pour former les travailleuses et travailleurs qui ne sont actuellement pas admissibles aux formations financées par le fédéral. » Ils sont cependant à déduire des investissements soulignés à la question 1.
Question 7 : La mise en œuvre des engagements du Canada envers l’UNESCO et sur la scène internationale dans le domaine de l’alphabétisation et de l’éducation des adultes
Le PLC souhaite que « le Canada retrouve sa position de leader sur la scène mondiale » et s’engage à « respecter nos engagements internationaux et montrer l’exemple ». Il est notamment question ici des engagements du Canada à l’égard du Cadre d’action Éducation 2030 de l’UNESCO (2015), de la Recommandation sur le développement de l’éducation des adultes (2015), du Cadre d’action de Belém (2009) et de la Déclaration de Hambourg sur l’éducation des adultes (1997).
Le suivi de la mise en œuvre des engagements
Dès la nomination du prochain gouvernement, l’ICÉA contactera les nouveaux ministres concernés relativement à la réalisation des engagements pris. Qui plus est, une enquête pilotée par l’Institut sur l’impact des décisions gouvernementales des dernières années en éducation des adultes permettra d’identifier des priorités en matière de redressement de la situation de l’éducation des adultes au niveau du gouvernement fédéral.
Comme le soulignait la déclaration co-signée par l’ICÉA, il est risqué d’abandonner l’éducation des adultes dans nos sociétés qui misent si fortement sur les connaissances et les compétences. Voilà pourquoi une priorité du prochain gouvernement fédéral devrait être de « répondre aux besoins d’éducation des adultes en fournissant des possibilités d’apprentissage de qualité ».