Le 1er avril 2020, la ministre déléguée à l’Éducation et ministre responsable de la Condition féminine, Mme Isabelle Charest, annonçait 10 millions $ supplémentaires au secteur communautaire, plus précisément au programme Soutien à l’action bénévole1. Cette enveloppe supplémentaire vient doubler les fonds déjà alloués à ce programme pour une somme totale de plus de 20 millions $ en 2020-20211.
Ce seront les 125 député·e·s du Québec qui recevront des fonds discrétionnaires supplémentaires à redistribuer aux organismes du milieu. Les sommes données aux député·e·s sont distribuées selon l’indice de défavorisation de chacune des circonscriptions2.
Lors de la conférence de presse journalière du premier ministre François Legault, un journaliste, Patrice Bergeron de la Presse canadienne, lui a demandé pourquoi ces sommes n’ont-elles pas été confiées à des institutions qui « ont une connaissance plus fine des budgets puis des problèmes de ces organismes-là » comme les CIUSS ou les municipalités3. Sa question faisait référence à la crainte exprimée par des personnes du milieu que des député·e·s utilisent des critères plus subjectifs pour choisir les organismes qui recevraient davantage de financement.
Le premier ministre, M. Legault, a mentionné l’importance de financer des services aussi essentiels que les banques alimentaires et ceux liés à la santé mentale. Il a mentionné que le réseau de la santé et des services sociaux peut « échapper » des personnes dans le besoin et, à ce titre, le milieu communautaire doit être financé selon les besoins. Tout en disant que les CISSS et les CIUSSS auraient pu assurer une telle distribution de fonds, il avançait que les député·e·s permettaient une plus grande souplesse. M. Legault donnait l’exemple que de personnes se présentant au bureau de comté pour un besoin non répondu. À ce moment, disait-il, la ou le député peut contacter un organisme et lui demander d’offrir le service tout en lui assurant des fonds supplémentaires.
Par ailleurs, Centraide Québec–Chaudière-Appalaches-Bas-Saint-Laurent considère que ce montant est insuffisant4. Avec les mises à pied importantes, les insécurités et besoins des personnes plus vulnérables, ainsi qu’un personnel réduit, les organismes communautaires peinent à répondre à l’augmentation des demandes.
Heureusement, d’autres organisations offrent aussi davantage de soutien financier. Comme le soulignait le Réseau québécois de l’action communautaire autonome (RQ-ACA) dans un communiqué du 3 avril : « Nous saluons les initiatives de la Ville de Montréal et de plusieurs Centraide, dont Centraide Québec et Chaudière-Appalaches et Centraide du Grand Montréal pour soutenir les organismes de première ligne tels que l’aide alimentaire, l’itinérance ou les hébergements 24/7 »5.
Toutefois, rapportait le RQ-ACA, « c’est tout le secteur communautaire qui subit la pression actuellement et non seulement les services prioritaires5. Dans un communiqué précédent, le RQ-ACA illustrait tous les organismes communautaires qui sont davantage sollicités : « par exemple, des centres de prévention du suicide, des OSBL d’habitation ou encore des organismes de défense des droits des chômeurs et chômeuses, etc. »6.
Comme nous avons pu le constater dans un précédent article, le RQ-ACA rapporte que « de nombreux organismes communautaires, malgré la fermeture de leurs locaux, ont adapté leurs activités et leur fonctionnement et maintiennent différemment le lien avec la population à travers les interventions téléphoniques. Il est certain que la crise du COVID-19 touchera plus fortement les populations que nous soutenons (Observatoire québécois des inégalités) et que leurs besoins seront grandissants. Beaucoup de mesures créatives sont actuellement en train de se déployer afin de les soutenir »6.
Il n’est toutefois pas possible d’identifier quels sont les organismes communautaires précisément dédiés à l’éducation qui sont encore actifs ou qui auront droit à des enveloppes supplémentaires. Cela dit, tous les organismes communautaires font de l’éducation populaire; cette dernière constitue même leur essence, comme le souligne la politique de l’action communautaire7.
À l’instar du ministre du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité sociale, M. Jean Boulet, nous croyons que le réseau communautaire est « essentiel pour maintenir et préserver le tissu social et pour venir en aide aux personnes les plus vulnérables de notre société »8.
_________________________________________________________________________________
5 https://rq-aca.org/2020/03/25/covid19_la_pression_monte_dans_les_organismes_communautaires/
6 https://rq-aca.org/2020/03/23/demande_soutien_urgence_pour_organisemes_communautaires/
7 Ministère de l’emploi et de la solidarité sociale. 2001. Politique gouvernementale de l’action communautaire. Une contribution essentielle à l’exercice de la citoyenneté et au développement social du Québec. Québec : MESS, p. 16.