ICEA

Institut de coopération pour l'éducation des adultes

L’ICÉA se dote d’une politique de communication et de rédaction inclusive

 

La rédaction inclusive : un outil pour contrer le masculin neutre

Dans la langue française, le masculin a longtemps été considéré et utilisé comme « le genre neutre ». Or, de plus en plus d’études montrent que le masculin n’a rien de neutre, et que de l’utiliser comme tel aurait des impacts négatifs sur les aspirations professionnelles des individus (Gygax, 2019; Steinbruckner et Thienot, 2016), et contribuerait à l’invisibilisation des femmes et des personnes non binaires dans les discours et représentations populaires (Leclerc et Miller, 2022). Devant ces constats, la rédaction inclusive s’est « progressivement imposée comme la modalité privilégiée de neutralisation de la hiérarchie de genre dans la langue écrite » (Della Sudda et Paoletti, 2022, p.149). Les pratiques de rédaction inclusives visent généralement à contrer l’invisibilisation grammaticale des identités de genre non masculines, en abandonnant l’utilisation du masculin générique, et en adoptant des méthodes d’écriture qui mettent de l’avant la présence des femmes, des personnes non binaires et des personnes à l’identité de genre fluide (Girard, Foucambert et Le Mené, 2022).

Bien que de nombreuses idées reçues sur ces pratiques perdurent encore (Bouanchaud, 2018), l’écriture inclusive a une présence sociale grandissante, comme en témoigne la multiplication des guides et lignes directrices en matière de communication inclusive publiées notamment par les différentes Universités du Québec, l’Office québécois de la langue française (OQLF) et même le gouvernement du Canada tout récemment (Roy, 2022). C’est dans cette foulée que l’ICÉA a décidé de se pencher sur la question de la rédaction inclusive, et de se positionner face à celle-ci.

La position de l’ICÉA

Reconnaissant l’importance de prendre en considération la diversité des personnes à qui l’ICÉA s’adresse et de la rédaction inclusive dans la lutte aux discriminations et aux inégalités genrées, l’ICÉA s’est dotée, le 15 novembre dernier, d’une politique de rédaction et de communication inclusive. À travers l’adoption de cette politique, l’ICÉA réaffirme l’inclusion et l’équité comme étant au cœur de ses valeurs et de ses actions.

Ainsi, l’ICÉA « s’engage à communiquer et à produire des documents s’inscrivant dans les principes d’inclusivité des genres, tout en préservant la lisibilité et l’intelligibilité des textes produits » (Politique de rédaction et de communication inclusive de l’Institut de coopération pour l’éducation des adultes, 2022). La politique vise à répondre à deux objectifs majeurs : 1) contribuer au mouvement de changement de pratiques en termes d’inclusivité dans la langue française; 2) proposer des techniques de rédaction et de communication et donner les outils nécessaires aux personnes en emploi à l’ICÉA, afin qu’ils et elles adoptent de façon systématique et cohérente les pratiques d’écriture inclusives.

Ces pratiques comprennent :

  • L’abandon du masculin générique;
  • L’utilisation de termes et de formulations neutres (termes épicènes, termes collectifs et tournures neutres de phrase);
  • La féminisation syntaxique (doublets longs et doublets abrégés).

Nous avons choisi de mettre sur pied une politique et non pas un guide de rédaction et de communication inclusive, puisque nous considérons qu’il existe déjà une multitude de guides d’excellente qualité au Québec. D’ailleurs, plusieurs de ces guides ont fortement influencé les réflexions et les décisions quant aux pratiques qui ont été adoptées par l’ICÉA, dont le Guide d’écriture inclusive du Centre de documentation sur l’éducation des adultes et la condition féminine (2021), le Guide de communication inclusive de l’Université du Québec (2021) ainsi que les lignes directrices canadiennes en matière d’écriture inclusive (Portail linguistique du Canada, 2022). Veuillez noter qu’une liste détaillée des articles et des guides ayant influencé la réflexion de l’ICÉA est disponible dans la politique de rédaction et de communication inclusive de l’ICÉA.

En ce qui concerne les doublets abrégés, le choix de l’ICÉA s’est arrêté sur l’utilisation du point médian. Cette décision est motivée par les nombreux avantages de cette technique : la clarté, la discrétion, la fluidité et la polyvalence (Université du Québec, 2021). Notons également que le point médian n’a aucune autre signification dans le texte et ne porte donc pas de signification sémantique alternative, contrairement à d’autres pratiques. Toutefois, nous reconnaissons que cette technique comporte des désavantages, puisque le point médian peut poser des problèmes aux utilisateurs et utilisatrices de logiciels de synthèse vocale, qui « [entendront] un message confus qui compromet la compréhension du sens de la phrase » (Institut Nazareth et Louis-Braille, 2021, en ligne). Malheureusement, à ce jour, aucun procédé de doublet abrégé n’est complètement compatible avec les logiciels de synthèse vocale (Institut Nazareth et Louis-Braille, 2021).

Dès maintenant, l’ICÉA s’engage dans un processus de transition vers une utilisation assidue de ces procédés dans toutes ses communications écrites ou orales, incluant les communications lors de congrès, les articles sur le site internet, les rapports de recherche et les communications internes. Les prochains temps seront donc une période d’adaptation et d’appropriation de ces nouvelles lignes directrices en matière de communication pour le personnel de l’ICÉA, et nous en profiterons pour nous autoformer, en équipe, sur le sujet. Bref, à travers l’adoption de cette politique, nous souhaitons « assurer la visibilité des femmes, des hommes et des personnes non-binaires dans toutes les communications, orales et écrites et tous les documents produits par l’ICÉA […], mais aussi lutter contre l'invisibilisation lexicale de la pluralité des genres » (Politique de rédaction et de communication inclusive de l’Institut de coopération pour l’éducation des adultes, 2022).

 

Cliquer ici pour consulter la version en ligne de la politique de rédaction et de communication inclusive de l’ICÉA.

Vous pouvez également télécharger la politique en format PDF, au bas de la page.

 

Sources

Bouanchaud, C. (2017, 23 novembre). Cinq idées reçues sur l’écriture inclusive. Le Monde. Repéré à https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2017/11/23/cinq-idees-recues-sur-l-ecriture-inclusive_5219224_4355770.html

Della Sudda, M. et Paoletti, M. (2022). Excluante, l’écriture inclusive? Travail, genre et sociétés, 47(1), 149‑152.

Girard, G., Foucambert, D. et Le Mené, M. (2021). Lisibilité de l’écriture inclusive : apports des techniques d’oculométrie. Psychological Bulletin, 124(3), 372‑422.

Gygax, P. (2019). Écriture inclusive : action futile ou réponse à un vrai problème? Une perspective psycholinguistique. Dans : Flückiger, Alexandre. La rédaction administrative et législative inclusive : la francophonie entre impulsions et résistances. Berne : Stämpfli, p. 27-38

Institut de coopération pour l’éducation des adultes (2022). Politique de rédaction et de communication inclusive. Repéré à https://icea.qc.ca/fr/politique-de-r%C3%A9daction-et-de-communication-inclusive.

Institut Nazareth et Louis-Braille (2021). Nouvelles-visions : Infolettre recherche et innovation, Institut Nazareth et Louis-Braille. Repéré au https://mailchi.mp/ssss.gouv.qc.ca/infolettre_nouvelles_vision_vol4_no8_octobre_2021?e=77be4f3501#mctoc3

Leclerc, C. et Miller, M. D. (2022). À qui la langue? Pratiques de l’écriture égalitaire. Travail, genre et sociétés, 47(1), 161‑164.

Roy. M. (2022, 12 septembre). « Guide de communication inclusive » du réseau de l’Université du Québec: un survol des pratiques d’écriture recommandées dans les établissements d’études supérieures. Correspondance. Repéré à https://correspo.ccdmd.qc.ca/document/guide-de-communication-inclusive-du-reseau-de-luniversite-du-quebec-un-survol-des-pratiques-decriture-recommandees-dans-les-etablissements-detudes-superieures/?fbclid=IwAR0VRjLmrXQAGVLZryVNyPcef-Dd5jtnMpLn6qkiQnKEbXPWokM6_6lWaxc.

Steinbruckner, M.-L. et Thienot, L. (2015). Impact du genre grammatical sur les sentiments d’efficacité personnelle d’élèves de collège. Des métiers au masculin : l’illusion du neutre. Raisons, comparaisons, éducations : la revue française d’éducation comparée, (13), 215‑228.