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ICEA

Institut de coopération pour l'éducation des adultes

Novembre, mois de la littératie financière

Littératie financièreLa littératie financière

La littératie financière est l’une des nombreuses déclinaisons de la littératie. Rappelons que la littératie est définit par l’OCDE comme l’une des « compétences clés en traitement de l’information » (OCDE, 2013) ou encore comme « l’aptitude à comprendre et à utiliser l’information écrite » dans les différentes sphères d’action de la vie courante (OCDE, 2000).

Dans un rapport présenté au ministre des Finances du Canada en 2011, la littératie financière est pour sa part présentée comme « le fait de disposer des connaissances, des compétences et de la confiance en soi nécessaires pour prendre des décisions financières responsables. » (ACAF, 2020) Cette définition souligne le caractère essentiel de la littératie financière, tant pour les personnes que pour la prospérité du pays (ACAF, 2020). On y affirme l’importance d’un ensemble de connaissances et de compétences spécifiques à la gestion des finances personnelles et à la prise de décisions dans ce domaine. Cette définition met par ailleurs en lumière la nécessité de développer ces connaissances et ces compétences chez les personnes afin d’accroître leur autonomie et de les aider à prendre les bonnes décisions.

Une autre définition, rendue publique en 2021 par l’Association canadienne des administrateurs de régimes de retraite (ACARR), présente la littératie financière sous un angle plus pratique. En accord avec la mission de l’ACARR, cette définition couvre des aspects précis de la gestion des finances personnelles (budget, dettes, épargne, investissements, planification de la retraite) : 

« la capacité à obtenir, comprendre et utiliser des connaissances pour gérer efficacement l'argent et atteindre le bien-être et les objectifs financiers. Une personne ayant des connaissances financières possède les compétences nécessaires pour prendre des décisions appropriées sur la façon d'aborder les dettes, de payer les factures, d'établir un budget, d'épargner, d'investir et de planifier sa retraite. » (ACARR, 2021)

Aujourd’hui, en novembre 2021, l’Agence de la consommation en matière financière du Canada (ACAF) soutient que la « littératie financière s'entend notamment des compétences dont une personne a besoin pour prendre des décisions financières éclairées et de sa capacité de prendre de telles décisions, ainsi que des gestes ou comportements qui permettent d'obtenir des résultats financiers favorables. La littératie financière est réputée être une compétence essentielle, tout comme la lecture et l'écriture. » (ACAF, novembre 2021)

Pour l’Agence, le renforcement de la littératie financière des adultes est un objectif central de son mandat : « Le marché financier est complexe et de plus en plus numérique, et de nombreux Canadiens continuent à éprouver des difficultés financières. L'ACFC est résolue à aider les Canadiens à surmonter ces défis. » (ACFC, nov. 2021)

Une forme de littératie jugée importante

Comme l’explique l’Agence, la littératie financière est devenue une priorité pour de nombreux pays depuis le milieu des années 1990 : « Un nombre croissant de représentants des administrations publiques ont commencé à prendre conscience des répercussions économiques importantes découlant des piètres connaissances financières et des mauvaises décisions financières des citoyens de leur pays, et ce, sur leur économie nationale et dans le monde entier. » (ACAF, 2020)

Au Canada, le gouvernement fédéral a imaginé une série de mesures susceptibles de favoriser le développement des compétences permettant aux personnes de prendre de meilleures décisions concernant les finances personnelles. Globalement, ces mesures s’inscrivent dans une perspective éducative et elles bénéficient d’un appui législatif depuis le début des années 2000. Le mois de la littératie financière est l’une de ces mesures.

Une littératie inscrite dans la Loi

L’importance accordée à la littératie financière est telle que cette déclinaison de la littératie est littéralement inscrite dans la loi.

L’adoption de la Loi sur l’Agence de la consommation en matière financière du Canada, en 2001, a présidé à la création de l’agence fédérale du même nom. L’article 3 de cette Loi précise que l’Agence a notamment pour mission « de renforcer la littératie financière des Canadiens et de sensibiliser les consommateurs en ce qui a trait aux obligations des institutions financières et des organismes externes de traitement des plaintes découlant des dispositions visant les consommateurs qui leur sont applicables et à toute question liée à la protection des consommateurs de produits et services financiers » (Loi sur l’Agence de la consommation en matière financière du Canada, article 3, paragraphe d).

La Loi assujettit « les institutions financières, les organismes externes de traitement des plaintes et les exploitants de réseaux de cartes de paiement » à la supervision de l’agence fédérale et son objectif est « de contribuer à la protection des consommateurs de produits et services financiers et du public, notamment en renforçant la littératie financière des Canadiens » (Loi sur l’Agence de la consommation en matière financière du Canada, article 2.1).

Une stratégie nationale pour la littératie financière

Les préoccupations du gouvernement fédéral au sujet de la littératie financière ont par ailleurs mené à l’élaboration d’une stratégie nationale pour la littératie financière. La première stratégie dévoilée en 2015 visait à « renforcer le bien-être financier » des personnes en leur fournissant les moyens de « gérer leur argent et leurs dettes judicieusement », de « planifier et épargner pour l’avenir » et de « prévenir la fraude et l’exploitation financière, et s’en protéger » (ACAF, 2015).

Depuis, une nouvelle stratégie a été rendue publique en août 2021. Cette dernière s’inscrit dans la continuité des actions déjà mises en œuvre et vise « à mobiliser l’écosystème afin d’obtenir une incidence plus grande et plus positive. L’accent n’est plus mis sur les habitudes individuelles, mais sur les obstacles systémiques et structurels qui empêchent de nombreux Canadiens d’atteindre de meilleurs résultats financiers ou limitent leurs efforts à cet égard » (ACAF, 2021).

Sous l’autorité du Chef du développement de la littératie financière, cette stratégie nationale est déployée auprès de la population par les gouvernements (fédéral, provinciaux et territoriaux), des organismes des secteurs privés et publics qui jouent un rôle en littératie financière ainsi qu’un comité directeur national dont la représentation provient de différents secteurs, ce qui assure une large expertise en matière de littératie financière.

Au Québec, l’Autorité des marchés financiers a lancée en 2015 la Stratégie québécoise en éducation financière (SQEF) dont elle est le maître d’œuvre. La stratégie québécoise est présentée comme « un chantier de mobilisation et de concertation des activités menées par les organismes et spécialistes œuvrant dans le domaine de l’éducation financière » (Autorité, 2021).

Le mois de la littératie financière

Plusieurs organisations proposent des activités dans le cadre du mois de la littératie financière. L'Ordre des comptables professionnels agréés du Québec (CPA) et l'Association des bibliothèques publiques du Québec (ABPQ), par exemple, sont engagés dans un programme de littératie financière. Des ateliers de littératie financière sont animés par des CPA bénévoles dans des bibliothèques publiques du Québec. Différents sujets sont abordés, de l’éducation financière des enfants à la gestion des finances à la retraite, en passant par les stratégies fiscales, la prévention de la fraude ou les stratégies d'épargne (CPA, novembre 2021). 

Statistique Canada, pour sa part, propose un webinaire sur le thème de l'indice des prix à la consommation (30 novembre). L’objectif est de comprendre l'inflation, comment elle est mesurée et ce qu'elle signifie pour nous.

D’autres organisations, comme la Financière Fairstone, proposent des webinaires et des activités dédiées à la littératie financière. L’Agence invite les personnes intéressées à visiter la page Canada.ca/mois-de-la-litteratie-financiere pour obtenir des renseignements les évènements et les activités qui auront lieu cette année, mais aussi pour avoir accès à des outils leur permettant de développer leur compétence en matière de littératie financière. 

La section Naviguer dans le marché financier de cette page permet d’avoir accès à des outils et des services numériques permettant d’accroître « la résilience financière de la population ». On retrouve notamment sur cette page un Planificateur budgétaire « novateur et personnalisé » ainsi que plusieurs calculatrices et outils utiles à la gestion des finances personnelles.

S’inspirer de l’action menée en littératie financière

L’action menée depuis plus de dix ans en matière de littératie financière devait inspirer les gouvernements, les institutions d’enseignements et tous les acteurs de l’éducation des adultes. 

L’attention accordée à la littératie financière est louable et légitime. Personne ne dira le contraire. Cependant, cette forme de littératie est entièrement tributaire des compétences des adultes à comprendre et à utiliser l’information écrite. La capacité d’une personne à trouver de l’information financière, la juger, l’évaluer et l’utiliser avec la confiance nécessaire pour agir et prendre des décisions éclairées dépend directement du niveau de littératienote 1 de cette personne. Dans cette perspective, la compétence clé en traitement de l’information qu’est la littératie (OCDE, 2013) se révèle tout aussi importante pour l’État et la population que la littératie financière. 

Rappelons ici que les résultats du rapport québécois du Programme international pour l’évaluation des compétences des adultes (PEICA, 2012) permettent de formuler les trois grands constats concernant les compétences en littératie des adultes de 16 à 65 ans (Dignard, 2015) : 

  1. une personne sur cinq (19 %)note 2 est susceptible de se retrouver dans une situation où elle éprouvera de grandes ou de très grandes difficultés à comprendre l’écrit. Ces personnes se classent aux niveaux 1 et inférieur à 1 de littératie ; 
  2. une personne sur trois (34 %) est susceptible de se retrouver dans une situation où sa capacité à lire sera relative à la présence de conditions facilitantes ou d’environnements écrits non complexes. Ces personnes se classent au niveau 2 de littératie ;
  3. moins d’une personne sur deux (47 %)note 3 est susceptible de démontrer la maîtrise de compétences en littératie qui feront en sorte qu’elle sera capable de lire sans difficulté et qu’elle sera incitée à le faire pour apprendre, comprendre, faire ou agir en toute autonomie. Ces personnes se classent aux niveaux 3, 4 ou 5 de littératie.

Dans cette perspective, toute volonté d’accroître nos compétences financières dans un monde de plus en plus numérique commande non seulement d’agir en matière de littératie financière, mais de rehausser les compétences en littératie des adultes. 

Selon l’enquête du PEICA (2012), la littératie, avec la numératie et la résolution de problèmes dans des environnements technologiques (RP-ET), est l’une des trois « compétences clés en traitement de l’information » qu’une personne doit développer et maintenir tout au long de la vie. Ces compétences sont essentielles à l’action d’une personne dans tous les domaines d’action de sa vie (santé, numérique, médias, information, finances, etc.).

Le développement de ces compétences est par ailleurs lui aussi lié à des coûts économiques, sociaux et autres. Selon la World Literacy Foundation, le coût d’un faible niveau de littératie pour un pays développé correspond une somme équivalente à 2 % de son produit intérieur brut (World Literacy Foundation, 2015). En dollars de 2018, le coût d’un faible niveau de littératie serait de plus de 35 milliards US pour le Canada et de plus de 6 milliards US pour le Québecnote 4

Notre monde se transforme chaque jour. Au gré de ces transformations, de nouveaux besoins en connaissances et en compétences apparaissent. Il s’en suit donc un accroissement et une grande diversification des besoins éducatifs des adultes. Voilà pourquoi, depuis des années, l'ICÉA réclame l’élargissement de l’action de l’État en éducation des adultes. 

La littératie financière et l’éducation économique sont des exemples de ces nouvelles exigences de connaissances et de compétences d’une société complexe. Dans un avenir pas si lointain, il pourrait être difficile de satisfaire à ces exigences si on n’accorde pas dès maintenant une priorité au maintien et au rehaussement des compétences des adultes en littératie. 

Notes

1. Le Programme international pour l’évaluation des compétences des adultes (PEICA, 2012) définit la littératie comme « la capacité de comprendre, d’évaluer, d’utiliser et de s’engager dans des textes écrits pour participer à la société, pour accomplir ses objectifs et pour développer ses connaissances et son potentiel » (OCDE, 2013).
2. Pour un portrait plus complet de ces personnes à risque d’exclusion, consulter : « Adultes de 16 à 65 ans ayant un faible niveau de compétence en littératie », Indicateurs de l’ICÉA, mise à jour de janvier 2019. En ligne : https://apprendre-agir.icea.qc.ca/index.php/INDICATEUR_5
3. Pour un portrait plus complet des compétences en littératie des adultes, consulter : « Niveaux de compétences des adultes en littératie », Indicateurs de l’ICÉA, mise à jour de novembre 2016. En ligne : https://apprendre-agir.icea.qc.ca/index.php/INDICATEUR_22
4. « Coûts d'un faible niveau de compétences en littératie », Indicateurs de l'ICÉA, mise à jour de décembre 2018. En ligne : https://apprendre-agir.icea.qc.ca/index.php/INDICATEUR_28

Références bibliographiques

ACFC (novembre 2021). « L'ACFC lance le Mois de la littératie financière 2021 », CNW Telbec, 1er novembre 2021, Agence de la consommation en matière financière du Canada (ACFC). En ligne : https://www.newswire.ca/fr/news-releases/l-acfc-lance-le-mois-de-la-litteratie-financiere-2021-890852154.html

ACFC (2021). Faisons des changements qui comptent : Stratégie nationale pour la littératie financière 2021-2026, Agence de la consommation en matière financière du Canada (ACFC), 45 p. En ligne : https://www.canada.ca/fr/agence-consommation-matiere-financiere/programmes/litteratie-financiere/litteratie-financiere-strategie-2021-2026.html

ACAF (2020). Contexte de la littératie financière, site Web de l’Agence de la consommation en matière financière du Canada, mise à jour du 22 juin 2020. En ligne : https://www.canada.ca/fr/agence-consommation-matiere-financiere/programmes/litteratie-financiere/litteratie-financiere-historique.html

ACFC (2015). Stratégie nationale pour la littératie financière – Compte sur moi, Canada, Agence de la consommation en matière financière du Canada (ACFC), 9 juin 2015, 20 p. En ligne : https://www.canada.ca/content/dam/fcac-acfc/documents/programs/financial-literacy/strategie-nationale-litteratie-financiere.pdf

ACARR (2021). Améliorer la littératie financière : Un ingrédient clé pour aider les Canadiens à faire de meilleurs choix financiers et à préparer leur retraite, Association canadienne des administrateurs de régimes de retraite (ACARR), 15 mars 2021. 17 p. En ligne : https://www.acpm.com/ACPM/media/media/resources/7/media/AGR/Govt_Submission/2021/ACARR-Ameliorer-la-litteratie-financiere-15-mars-2021.pdf.

CPA (novembre 2021). « Novembre, mois de la littératie financière - Les CPA du Québec présentent près de 50 ateliers de littératie financière », CNW Telbec, 1er novembre 2021, Ordre des comptables professionnels agréés du Québec (CPA). En ligne : https://www.newswire.ca/fr/news-releases/novembre-mois-de-la-litteratie-financiere-les-cpa-du-quebec-presentent-pres-de-50-ateliers-de-litteratie-financiere-870524066.html

Loi sur l’Agence de la consommation en matière financière du Canada, L.C. 2001, ch. 9. Site Web de la législation (Justice), mise à jour du 30 juin 2021. En ligne : https://laws-lois.justice.gc.ca/fra/lois/F-11.1/page-1.html.

Fairstone Financière (octobre 2021). « Fairstone Financière Inc. activement engagée dans le Mois de la littératie financière », CNW Telbec, 28 octobre 2021, Fairstone Financière Inc. En ligne : https://www.newswire.ca/fr/news-releases/fairstone-financiere-inc-activement-engagee-dans-le-mois-de-la-litteratie-financiere-806831062.html

Dignard, H. (2015). « Lire pour apprendre, comprendre et agir », Apprendre + Agir, Édition 2015, décembre 2015, Institut de coopération pour l’éducation des adultes (ICÉA). En ligne : https://icea-apprendreagir.ca/lire-pour-apprendre-comprendre-et-agir/.

OCDE (2013). Perspectives de l’OCDE sur les compétences 2013 : Premiers résultats de l’Évaluation des compétences des adultes, Éditions OCDE, 484 p. En ligne : https://www.oecd.org/fr/competences/piaac/Skills%20(FR)-- eBook_Final_B%C3%A0T_06%20dec%202013).pdf.

OCDE (2000). La littératie à l’ère de l’information, Rapport final de l’Enquête internationale sur la littératie des adultes (EIAA, 1994), Édition OCDE, 211 p. En ligne : https://www.oecd.org/fr/education/innovation-education/39438013.pdf

World Literacy Foundation (2015).The Economic & Social Cost of Illiteracy A snapshot of illiteracy in a global context 24 August 2015, Final report from the World Literacy Foundation, World Literacy Foundation. En ligne : https://worldliteracyfoundation.org/wp-content/uploads/2021/07/TheEconomicSocialCostofIlliteracy-2.pdf

Autorité (2021). « Stratégie québécoise en éducation financière (SQEF) », site Web de l’Autorité des marchés financiers, mise à jour de 2021. En ligne : https://lautorite.qc.ca/grand-public/specialistes-en-education-financiere/strategie-quebecoise-en-education-financiere-sqef