Au mois de février, l’ICÉA a lancé une consultation sur les grands chantiers en éducation des adultes. À la suite de cette consultation, qui a été prolongée jusqu’au 6 mai prochain, nous avons décidé de poursuivre la réflexion sur les grands chantiers en organisant une série de webinaires gratuits sur l’éducation des adultes.
Le 11 avril dernier a eu lieu le premier webinaire. Celui-ci portait sur la formation générale des adultes (FGA). Plusieurs enjeux et préoccupations concernant ce secteur ont été exprimés par les participantes et les participants lors du webinaire : la baisse d’intérêt pour la formation dans un contexte de pénurie de main-d’œuvre, le défi de répondre aux besoins d’adultes en apprentissage ayant une diversité de profils, la complexité des filières de la francisation, l’évaluation des apprentissages, etc. Il a aussi été question de stratégies à adopter pour faire entendre les revendications en éducation des adultes en vue des prochaines élections générales au Québec le 3 octobre 2022.
Maintenir des personnes en formation, particulièrement dans un contexte de pénurie de main-d’œuvre et de quasi-plein emploi
Bien que les adultes de 25 ans et plus soient, depuis quelques années, plus nombreux à la FGA que ceux de 24 ans et moins, des participants ont exprimé une préoccupation pour la diplomation des 16-20 ans.
Les défis de retenir et de diplômer les jeunes adultes dans le contexte de la pénurie de main-d’œuvre ont été évoqués. Quelles solutions devraient être envisagées ? L’idée d’octroyer des bourses pour inciter ces personnes à terminer leur formation a été mentionnée. Cette préoccupation a aussi été abordée sous l’angle de la sécurisation financière des apprenantes et des apprenants, un élément majeur pour empêcher le décrochage et les abandons.
La baisse de la motivation ainsi que la diminution du désir et du besoin de réussir, et de décrocher un premier diplôme ou une première qualification ont également été notées en lien avec cet accès plus facile au marché du travail.
En lien avec le contexte de pénurie de main-d’œuvre, l’enjeu de l’accès à une formation qualifiante et transférable ressort comme étant une préoccupation alors que des employeurs recrutent des personnes sans diplôme (avec une deuxième ou une troisième secondaire) qu’ils forment en entreprise. Cette façon de faire ne permet pas nécessairement aux personnes de développer les connaissances et les compétences nécessaires pour s’adapter aux transformations du marché du travail et faire face à d’éventuelles pertes d’emploi.
Dans ce contexte, une réflexion sur les parcours de formation possibles pour les personnes en emploi apparaît nécessaire. Peut-on imaginer des formes d’alternance travail-études (ATE) à la FGA, comme celles qui existent à la formation professionnelle et technique ? Comment penser ou repenser la formation de base en entreprise pour rejoindre les adultes là où ils sont et répondre à leurs besoins ?
Répondre aux besoins d’apprenantes et d’apprenants adultes ayant une diversité de profils et de réalités
On retrouve une diversité de profils d’apprenantes et d’apprenants à la FGA. Répondre à leurs besoins constitue un véritable défi. Des objectifs de formation différents sont donc poursuivis, par exemple, diplômer rapidement de jeunes adultes et accompagner dans leur parcours de formation des adultes plus âgés qui, dans certains cas, ont interrompu leurs études depuis très longtemps.
Il a aussi été question des élèves handicapés ou en difficulté d’adaptation ou d’apprentissage (HDAA) qui ne reçoivent pas toujours les services dont ils ont besoin. L’importance de repenser le soutien et le financement pour ces catégories d’élèves a été soulevée afin de mieux répondre à la complexité et à la diversité de leurs besoins.
Cet enjeu a aussi été abordé sous l’angle du droit à des services éducatifs favorisant l’apprentissage et la réussite, droit qui serait dénié à une partie de la population. Il a été rappelé que dans la loi sur l’instruction publique (LIP), l’article 2 reconnaît le droit à l’éducation des adultes, mais sans le circonscrire et le préciser.
Toute personne qui n’est plus assujettie à l’obligation de fréquentation scolaire a droit aux services éducatifs prévus par les régimes pédagogiques établis par le gouvernement en vertu de l’article 448, dans le cadre des programmes offerts par le centre de services scolaire en application de la présente loi (Loi sur l’instruction publique, c1, art 2).
La francisation
Plusieurs enjeux touchant le secteur de la francisation ont également été discutés, notamment la complexité des filières de la francisation. Il a été question de la réorganisation des services proposée par le gouvernement du Québec dans le projet de loi 96. Rappelons que la francisation est actuellement offerte dans une diversité de lieux, qu’elle est financée par plusieurs ministères, dont le ministère de l’Éducation (MEQ) et le ministère de l'Immigration, de la Francisation et de l’Intégration (MIFI), et qu’elle rejoint une grande diversité de profils d’adultes. La reconnaissance de la francisation comme étant une des missions de l’école québécoise est souhaitée. Cet élément a été abordé en lien avec la sécurisation des carrières enseignantes.
Évaluation des apprentissages et pratiques pédagogiques
Les enjeux entourant l’évaluation, particulièrement l’évaluation unique à la fin du parcours en formation de base commune (FBC) et en formation de base diversifiée (FBD) et ses impacts sur la réussite, ont également fait l’objet de commentaires. Rappelons que la FBC correspond aux huit premières années de la scolarisation (alphabétisation, présecondaire et les deux premières années du secondaire) et la FBD aux trois années du deuxième cycle du secondaire. La question des pratiques pédagogiques dans les centres d’éducation des adultes a aussi été abordée en lien avec la réforme des curriculums et ses impacts sur la persévérance et les abandons. Enfin, la question de l’évaluation en formation à distance a été soulevée.
Nouvelle politique en éducation des adultes et défis stratégiques
Durant le webinaire, les enjeux autour d’une nouvelle politique en éducation des adultes, et particulièrement de sa mise en œuvre, ont été soulevés. Au-delà du contenu d’une nouvelle politique, on se demande si la volonté politique pour la planification et la mise en œuvre d’une nouvelle politique est là.
De plus, une certaine mise en réseau des acteurs et des organismes est souhaitée pour faire avancer la cause de l’éducation des adultes et faire entendre des revendications qui sont portées depuis des années.
Liens avec les résultats de la consultation de l’ICÉA
Plusieurs des enjeux abordés dans le cadre de ce webinaire rejoignent les thèmes et les défis qui ont été soulevés dans le cadre de la consultation qu’a lancée l’ICÉA en février dernier. On peut mentionner :
- Les différentes missions de la FGA;
- La réponse aux besoins des différents profils d’adultes en apprentissage;
- Les impacts de la réforme, particulièrement en ce qui concerne l’enseignement des mathématiques;
- Le financement et la répartition des ressources;
- La réglementation, l’accessibilité, l’équité, l’offre et l’organisation des services complémentaires aux élèves;
- L’évaluation des apprentissages;
- Les changements internes (diversité et évolution des réalités des élèves) et externes (pandémie de covid-19) qui affectent la FGA.
La FGA en quelques mots
En terminant, rappelons qu’au Québec, on compte près de 194 centres d’éducation des adultes, dont 184 dans le réseau public (Pelletier, 2022). Ces centres d’éducation des adultes offrent une diversité de services d’enseignement : soutien pédagogique, alphabétisation, présecondaire, premier cycle du secondaire, second cycle du secondaire, intégration sociale, intégration professionnelle, francisation, préparation à la formation professionnelle et préparation aux études postsecondaires. En 2019-2020, les effectifs scolaires de la FGA étaient de près de 160 000 personnes. Parmi ces effectifs, les adultes de 25 ans et plus (57 %) sont plus nombreux que ceux de 24 ans et moins (43 %). Les femmes sont également plus nombreuses (55 %) que les hommes (45 %). Depuis quelques années, les effectifs de la FGA sont en baisse. Pour en savoir plus, voir les indicateurs de l’ICÉA : https://apprendre-agir.icea.qc.ca/index.php/INDICATEUR_9
Pour voir ou revoir ce webinaire
Vous n’avez pas pu assister à ce webinaire, il est possible de l’écouter ici : https://www.youtube.com/watch?v=A6b9dvL0nn4
Pour vous inscrire aux prochains webinaires
Pour vous inscrire au webinaire du 25 avril sur l’éducation populaire, cliquez ici : https://crm.icea.qc.ca/civicrm/event/info?reset=1&id=10
Pour vous inscrire au webinaire du 2 mai sur le chantier de réflexion sur une nouvelle politique d’éducation des adultes, cliquez ici : https://crm.icea.qc.ca/civicrm/event/info?reset=1&id=11